La fondation Mo Ibrahim s’intéresse à la place de l’Afrique dans un monde en recomposition

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Alors que les équilibres géostratégiques connaissent une recomposition majeure, il est primordial de repenser la position de l’Afrique dans le monde et de remédier à sa marginalisation au sein de l’architecture multilatérale. C’est la conclusion d’un rapport publié le 14 juillet par la Fondation Mo Ibrahim, qui souligne l’énorme potentiel du continent africain pour contribuer à résoudre les défis mondiaux partagés. Ce potentiel est dû à sa croissance démographique soutenue, à sa jeunesse dynamique et à ses abondantes ressources naturelles essentielles pour une économie décarbonée.

Intitulé « Global Africa – Africa in the world and the world in Africa », le rapport résume les principales conclusions des débats tenus lors du Forum « Ibrahim Governance Weekend » qui s’est tenu à Nairobi du 28 au 30 avril 2023. Les dirigeants du continent, les grandes institutions, les experts et les représentants de la société civile ont tous souligné la nécessité de changer le récit sur l’Afrique, qui perpétue une vision obsolète d’un continent en proie à toutes les crises mondiales et nécessitant d’être sauvé par le reste du monde. Or, l’Afrique dispose d’atouts considérables qui non seulement favorisent son propre développement durable, mais aussi en font un acteur majeur pour résoudre les défis mondiaux.

Le rapport met en évidence le potentiel considérable de l’Afrique, qui s’appuie sur une population jeune en pleine expansion, des ressources minérales abondantes indispensables à une économie mondiale verte, des centaines de millions d’hectares de terres arables et un marché de consommateurs de 1,4 milliard de personnes. Avec 18 % de la population mondiale, soit 1,4 milliard d’individus, l’Afrique représente déjà deux fois la population de l’Europe (743 millions). D’ici 2100, la population africaine devrait augmenter de 2,2 milliards de personnes, tandis que les autres régions du monde connaîtront un déclin démographique.

L’Afrique se distingue également par sa jeunesse, avec un âge médian de 18,8 ans, ce qui en fait déjà le continent le plus jeune du monde. Cette tendance se poursuivra, puisque d’ici 2100, l’âge médian atteindra 35 ans en Afrique, comparé à une moyenne de 44 à 50 ans dans les autres régions du monde. La jeunesse africaine représentera ainsi près de la moitié de la jeunesse mondiale.

D’ici 2050, l’Afrique abritera un quart de la main-d’œuvre mondiale, puis plus de 40 % d’ici 2100. L’urbanisation en Afrique est également plus rapide que dans n’importe quelle autre région du monde. L’Europe a mis 110 ans pour passer d’un taux d’urbanisation de 15 % à 40 % (1800-1910), tandis que le continent africain n’a mis que 60 ans (1950-2010).

Le rapport souligne que bien que l’Afrique ne représente actuellement que moins de 3 % du PIB mondial, elle enregistre une croissance économique très élevée. Selon les prévisions du Fonds monétaire international (FMI), les économies africaines devraient connaître une croissance moyenne supérieure à la moyenne mondiale au cours des cinq prochaines années, ce qui fera de l’Afrique la région la plus dynamique à partir de 2025, dépassant même l’Asie.

En 2023, le taux de croissance de l’Afrique sera plus de six fois supérieur à celui de l’Europe et deux fois supérieur à celui de l’Amérique du Nord. Pas moins de dix pays africains figurent parmi les 20 économies à la croissance la plus rapide cette année. Cette forte croissance économique s’accompagne d’une augmentation de la classe moyenne, créant ainsi un marché de consommateurs de 1,4 milliard de personnes. Dans ce contexte, la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) représente le plus grand marché potentiel au monde, dépassant en taille les marchés uniques de l’Union européenne (UE), de l’Accord États-Unis-Mexique-Canada (USMCA) et du marché commun de l’Amérique du Sud (MERCOSUR) combinés.

En outre, l’Afrique est appelée à jouer un rôle crucial dans la transition mondiale vers une économie décarbonée en raison de sa détention de 30 % des réserves mondiales de minéraux, y compris des minéraux essentiels aux énergies renouvelables et aux technologies propres telles que les batteries électriques, les panneaux solaires et les éoliennes.

La production de minéraux tels que le lithium, le graphite et le cobalt devra augmenter de près de 500 % d’ici 2050 pour répondre à la demande croissante à l’échelle mondiale, et cela ne sera possible qu’avec les ressources africaines. En outre, la forêt du bassin du Congo séquestre plus de CO2 que l’Amazonie et l’Asie du Sud-Est réunies, en faisant ainsi le plus important puits de carbone tropical.

Malgré ce potentiel énorme, la représentativité de l’Afrique dans l’architecture multilatérale actuelle reste très limitée. Avec 54 pays, le continent africain ne dispose que de 28 % du total des voix à l’Assemblée générale des Nations Unies, sans siège permanent au Conseil de sécurité.

L’Afrique compte également le plus grand nombre de membres au FMI (54 sur 190), mais ne détient que 6,5 % des droits de vote au sein de cette institution. À la Banque mondiale, le continent n’a que 11 % des droits de vote.

Le rapport souligne la nécessité de remédier rapidement à cette faible représentativité de l’Afrique dans les instances de gouvernance mondiale afin de refléter le poids réel du continent et de défendre le principe du multilatéralisme. Il souligne également que pour développer une voix africaine forte capable de défendre des priorités communes dans les forums internationaux, il est essentiel de renforcer l’Union africaine (UA) et de promouvoir une position commune africaine.

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